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FATAL VIRUS

I hope that people will finally come to realize that there is only one 'race' - the human race - and that we are all members of it.

Ces mots viennent d’une Margaret Atwood qui espère qu’un jour nous finirons par réaliser que nous sommes tous les membres d’une seule et même race – la race humaine. C’est également ce que j’espérais il y a encore quelques heures.


Il paraît qu’en temps de grand trouble, lorsque l’humanité tout entière doit faire face à une même menace, les nations oublient leurs différends politiques, leurs différences culturelles et la haine qu’elles nourrissent les unes envers les autres pour se ranger sous et faire appel à leur humanité au nom de l’Humanité.

Alors que le Covid-19 gagne du terrain, nos cœurs naïfs et désespérés de connaître la paix et l’amour, ont vu cette période effrayante comme l’occasion de nous serrer les coudes, de nous soutenir les uns les autres, de garder ceux qu’on aime près de nous, de faire la paix avec ceux que l’on a blessés, de renouer avec ceux que notre ego a gardés à distance, de mobiliser toutes ces belles valeurs qui font de nous des êtres humains.


Pour l’Humanité, il est plus qu’urgent de ne plus nourrir le vice pour embrasser la vertu.


En cette période terrifiante, beaucoup ont exprimé le besoin de faire un état des lieux de leur vie, de leurs choix, de faire une introspection afin de, une fois la crise passée, retrouver "la bonne voie" , sortir de schémas destructeurs et de s’éloigner de personnes inhumaines. Evidemment, cette sorte de quête rédemptrice ne serait pas sans lever quelques remarques quant à notre hypocrisie : pourquoi faut-il attendre un désastre pour commencer à agir avec humanité ? Pourquoi faut-il entrevoir son extinction pour commencer à penser à l'Humanité ? Pour ma part, je pense qu’il n’est jamais trop tard pour cette introspection rédemptrice.

Pourtant, ce questionnement n’a même pas eu le temps de surgir ; ces questions ont été ensevelies avec notre humanité sous les couches putrides de tout ce qu’on a de pire à offrir. Voilà ce que nous sommes devenus.

A force de nous prélasser dans l’abject et dans le putrescent, nous ne sommes même plus dérangés par ces excréments qui, coincés dans notre gorge, nous étouffent lentement.

Solidarité ? Unité ? Amour ? Paix ? Loin de tout cela, nous nous retournons les uns contre les autres.


Alors qu’un virus mortel nous oblige à nous confiner, nous prenons conscience, si nous en avons l’honnêteté, des réalités sur lesquelles nous nous efforcions, lâches, de fermer les yeux : la survie que constitue le quotidien de milliers d’entre nous. Pour exemple, nous réalisons avec horreur que beaucoup, des enfants maltraités, des femmes et des hommes victimes de violences sont condamnés à être enfermés avec leurs bourreaux. Nous devrions être alertés, et nous devrions redoubler de vigilance – voire même commencer à être vigilants. Nous devrions être inquiets et nous assurer que nos voisins vont bien, qu’ils ne manquent de rien. Au lieu de cela, nous prenons ce virus à la légère et nous nous conduisons comme des chiens. Nous rions à des blagues faites à ce sujet. Nous dansons sur de ridicules chansons composées sur ce sujet. Au lieu de cela, nous nous montrons égoïstes et violents ; certaines ordures vont jusqu’à faire couler le sang pour du papier toilette pendant que d’autres charognes cambriolent leurs voisins.

Qu’on se le dise : l’homme civilisé est l’invention perfide d’un certain homme complexé désireux de cacher la pourriture sauvage qu’il est en réalité.

Alors même que ce virus n’était encore cantonné qu’à la Chine, nous avions, moqueurs, expliqué le malheur vécu par la population chinoise par le karma. Alors que le virus commençait sa progression, nous avons vu le racisme dont le système se défend pourtant, grandir dans les rues de Paris et sur les réseaux sociaux.

En l’espace de quelques heures, ce virus mortel est devenu l’excuse parfaite pour enfin laisser ce racisme qui devenait de plus en plus difficile à cacher s’exprimer librement.

Lorsque nous ne les persécutons pas nous-mêmes, nous regardons, sans réagir, des Asiatiques se faire persécuter, persuadés que notre inaction n’est pas une preuve de notre culpabilité. Nous entendons des politiciens appeler ce virus le « China virus », et nous répétons, sans réflexion aucune et dans aucune humanité, cette ignominie raciste.

Alors que nous rendons hommage aux victimes chinoises, un journaliste français de BFMTV ose tranquillement chuchoter : « Ils enterrent des Pokémons. » Si ce n’est pas du racisme, s’il-vous-plaît, dites-moi ce que c’est ! Une maladresse ? Non…un simple dérapage. En effet, alors que la plupart des médias français parlent d’un « dérapage », le patron de la chaîne accentuent le fait que ces « propos totalement inappropriés » ont été « diffusés de manière involontaire ». Si vous suivez Le Study Vlog, vous savez qu’il est plus que primordial de prêter attention à la terminologie : parce que le langage définit le monde dans lequel nous vivons, le vocabulaire employé impose une idéologie en même temps qu’il en dissimule les réalités. Parce que cette République pseudo-humaniste basée sur un système fourbe et inhumain jure que le racisme n’existe pas, elle est incapable, coincée dans une hypocrisie répugnante, ni de dénoncer honnêtement ni même de nommer ce qui est pourtant évident : le racisme. Si, pour sauver la face, ce "dérapage" est relaté, remarquons que ce n’est jamais pour dénoncer le racisme de ce soi-disant journaliste, mais son simple dérapage. Ce qui est dénoncé, c’est le fait que ce soi-disant journaliste ait laissé son racisme s’exprimer involontairement. Et pour cela, il sera sanctionné … pendant une semaine.

Qu’on se le dise : le racisme est la norme … mais gare à ceux qui osent être ouvertement racistes.


      C’est ce même racisme qui se manifeste lorsque nous écoutons des Français demander avec fureur pourquoi l’Afrique est moins touchée par ce virus que l’Europe. Il faut croire qu’il est normal, dans leurs vils esprits étriqués, que les pays du Sud, à commencer par les pays africains, soient touchés par la mort avant et voire même au lieu de l’Occident. Cette belle République pseudo-humaniste et hypocrite ne peut plus cacher le système colonial qui l’alimente alors même qu’elle tente, en nous martelant depuis des années de notions telles que le « post-colonialisme », de nous faire croire que cela appartient au passé, voire même que cela n’a jamais existé. La France métropolitaine se comporte, tant avec les départements d’Outre-mer qu’avec les nations africaines, en administratrice de ses colonies.

Rien de plus normal dès lors, pour des touristes métropolitains irrespectueux de profiter de nos belles plages de Grande-Terre en plein confinement de la Guadeloupe et d’insulter, dans leur toute-puissance, les habitants qui osent les rappeler à l’ordre. Que cela nous plaise ou non, les loisirs de l’homme blanc se font au détriment de la santé de l’homme noir. Et gare à celui qui ose remettre en question ce privilège. Rien de plus normal dès lors, pour une France colonisatrice, de penser le peuple africain comme un cobaye pour ses expérimentations. Parce que piller les terres de l’Afrique n’était pas suffisant pour l’avide Europe colonisatrice, il fallait également qu’elle en décime son peuple. Et parce qu’elle se "réfugie dans une hypocrisie d'autant plus odieuse qu'elle a de moins en moins de chance de tromper", pour reprendre la formule de Césaire (Discours sur le colonialisme, 2004 [1955] : 7), elle a notamment camouflé ses actions barbares par des campagnes de vaccinations. L’Histoire de la médecine coloniale nous montre que plusieurs fois déjà, l’Europe a entrepris d’éradiquer le peuple africain tout en se faisant passer pour le Grand Sauveur. Il est donc tout à fait normal, qu’un médecin propose que la France expérimente un possible vaccin contre le covid-19 sur la population africaine, avant d’être conforté dans cette pensée par son confrère.

Soyons honnêtes et remarquons avec quelle aisance cette pensée est exprimée, et prenons dès lors conscience que ce n'est pas la nostalgie d'un passé colonial qui est exprimée mais bel et bien la normalité d'un système actuel. Les non-excuses de l'Inserm posant explicitement que nous sommes de grands abrutis qui ne comprenons rien sont la cerise pourrie sur le gâteau de la cruauté.

      C'est tout le système de santé qui est remis en question à l'heure même ou des étudiants noirs avouent négliger leur santé aussi bien physique que mentale par lassitude de se retrouver face à un interlocuteur étranger aux problématiques qu'ils rencontrent, ou par peur de se retrouver entre les mains d'un médecin raciste. Ce sont la Liberté et la Fraternité dont la République française se sert pour jurer de son humanisme qui sont (enfin) remises en question. C'est notre humanité qui est remise en question.

A l'heure où nous devrions nous inquiéter d'un virus mortel, force est de constater que l'Humanité n'a jamais connu et ne connaîtra jamais plus fatal virus que l'Homme lui-même.


J'ai l'habitude de finir mes articles par une note positive remplie d'espoir. Mais aujourd'hui, je ne peux m'empêcher de m'interroger : Sommes-nous arrivés à un point de non-retour? Ce point qui nous montre qu'il est trop tard pour l'Humanité? Devons-nous nous rendre à l'évidence selon laquelle il n'y a plus aucun espoir pour l'Humanité? Si tel est le cas et si vous avez lu Au huitième jour, vous savez déjà que bien que je travaille pour la décolonisation, je ne pense pas que nous soyons dans une simple guerre raciale, mais que nous sommes les acteurs d'une véritable guerre du Bien contre le Mal. Peut-être est-ce encore une fois ma naïveté qui parle, mais l'unique note positive que je peux désormais vous proposer serait de penser au Jugement Dernier... Si l'Humanité est vouée à disparaître, persuadons-nous que nous serons tous jugés à la fin. Il nous faut donc dès maintenant choisir notre camp et agir en conséquence.


Je m'excuse auprès de ceux qui imaginent que difficilement  ou qui ne croient pas à cette notion de Jugement Dernier, mais c'est là tout ce qu'il me reste, éternelle naïve que je suis, afin de rester accrochée à l'espoir et à l'amour.


Prenez soin de vous, prenons soin des uns des autres, et permettez-moi la niaise mais sincère supplication : aimons-nous les uns les autres.

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